Si petite qu’elle soit, avec ses 468 km2 et ses 78.000 habitants, la Principauté d’Andorre est un État souverain, c’est-à-dire indépendant et reconnu par les autres États. Le catalan est son unique langue officielle, mais il est difficile de rencontrer un Andorran qui ne soit pas au moins trilíngue.
L’Andorre faisait partie de la Catalogne, mais au XIIIe siècle elle a bénéficié d’un statut particulier privilégié, tout comme d’autres vallées pyrénéennes, car il fallait y maintenir de la population. Les paréages de 1278 et 1288, signés par l’évêque d’Urgell et le comte de Foix créent une coprincipauté. Les droits de Foix passèrent au roi de France et aujourd’hui au président de la République Française. Bien que les seigneurs éclésiastiques aient perdu leurs pouvoirs temporels, l’évêque d’Urgell a gardé les siens sur ces vallées. L’Andorre devint indépendante de fait lorsque les institutions de la Catalogne disparurent à cause du décret de Nova Planta, en 1714. Peu après le Manual Digest affirma les droits des andorrans. La Révolution française a voulu libérer les andorrans, mais elle les laissait sous la seule autorité épiscopale. Napoléon 1er rétablit définitivement la coprincipauté.
Malgré des réformes aux XIXe et XXe siècles, qui ne concernaient que le seul Conseil Général élu par les andorrans, et malgré les demandes de constitution, dans les années quatre-vingt du XXe siècle, les coprinces demeuraient tout-puissants. Libérés de la pression économique des États voisins, donc des coprinces, par l’accord commercial de 1990 avec la Communauté Économique Européenne, le Conseil Général et le gouvernement andorrans exigèrent l’ouverture de négociations. La Constitution fut approuvée en 1993. La même année l’Andorre entrait comme 184ème membre des Nations Unies, et avec elle le catalan devenait langue de chancellerie. En 2019, avec les autres microétats d’Europe, l’Andorre a signé un accord d’association avec l’Union Européenne. Il m’est agréable de faire noter que l’Andorre doit son existence et son affirmation constante, pendant des siècles et jusqu’à la pleine souveraineté, aux seuls Andorrans et à leurs vertus en tant que peuple et communauté.
Après bien des siècles d’isolement et d’une vie agropastorale austère jusqu’à mi XXe siècle, l’Andorre a connu une croissance économique rapide, et dans un premier temps désordonnée, basée sur un commerce suscité par une grande différence de prix et par sa position entre France et Espagne, accompagné par un tourisme qui s’élargissait progressivement et qui gagnait en qualité. Aujourd’hui l’économie de l’Andorre est prospère et extrovertie, basée sur le tourisme d’hiver et d’été et sur le commerce, qui a changé de profil, avec des millions de visiteurs chaque année. Cependant l’Andorre a toujours des problèmes sociolinguístiques et doit assimiler les étrangers et leurs fils, car la forta immigration de travail pendant des décennies, sans guère intégration, a rendu les citoyens andorrans minoritaires chez eux.
En effet, la population est passée de 6.200 habitants en 1955 à 26.000 vingt ans après et à 66.000 en 2000. Une législation très restrictive a limité l’accès à la nationalité pendant longtemps, y compris pour les fils d’andorrans nés à l’étranger. Cette évolution a amené les andorrans à être seulement le tiers des habitants dans les années soixante et 17% en 1992, alors que les espagnols dépassaient la moitié. Après un changement des normes légales et l’intégration des andorrans qui vivaient à l’étranger, des personnes nées en Andorre et des résidents les plus anciens, les citoyens andorrans représentent aujourd’hui les 41% de la population, les espagnols 34%, suivis des portugais et des français avec respectivement 17 e 6,5% du total. Les élèves se répartissent entre trois systèmes d’enseignement, le français et l’espagnol, dits écoles des coprinces, et l’école andorrane.
Si l’Andorre était membre de l’Union Européenne, comme il en est question à moyen terme, le catalan serait une langue européenne de plein droit, mais seulement pour les Andorrans. Cela aurait bien sûr une influence positive, par exemple grâce à son introduction dans tous les programmes européens, mais ce n’est pas pour cela que les citoyens des autres Pays Catalans en pourraient bénéficier. Ce sont les États qui fixent les normes légales et linguistiques, valables sur leur territoire comme dans les institutions européennes. Si un État reconnait et utilise ses langues, l’Union Européenne les intègre dans ses pratiques, et pas le contraire.